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ÉDIFICES RELIGIEUX
A. - ÉGLISE SAINT-FIACRE
1. - Présentation générale L'église de Guengat, presque carrée, a un aspect vénérable avec ses nombreux pignons garnis de crossettes, son clocher chevauchant l'édifice en son milieu, la forme tassée et robuste de sa construction. Comme presque toutes les églises, elle est orientée de l'est à l'ouest. Elle a comme titulaire saint Fiacre et comme second patron saint Jean-Baptiste.
a) Saint Fiacre Il était fils d'Eugène IV, roi d'Écosse (570). Ayant quitté la Cour de son père afin de se consacrer à Dieu, avec sa soeur Sira, il se retira dans un lieu solitaire, à Breuil (aujourd'hui Saint-Fiacre), pour s'y livrer aux pratiques de piété, après avoir obtenu l'autorisation de saint Faron évêque du diocèse. Mais, le nombre des pèlerins et des pauvres qui venaient le voir était si grand que le petit enclos que lui avait donné saint Faron devenait insuffisant pour qu'il put se procurer les choses nécessaires pour ses hôtes. Il eut de nouveau recours au saint Évêque, qui promit de lui donner autant de terre autour de sa retraite qu'il pourrait lui-même en un jour, et en creusant de ses mains, entourer d'un petit fossé. De retour dans sa solitude, le saint se mit en prière, puis prenant un bâton, il traça sur la terre une ligne pour faire le circuit de son jardin. Mais, oh prodige ! à mesure qu'il avançait la terre s'ouvrait d'elle-même et les arbres tombaient de côté et d'autre. Voyant cela, une femme du voisinage courut prévenir l'Évêque, accusant l'ermite de magie. Puis revenant sur ses pas, elle l'accabla d'injures, lui faisant défense de continuer, déclarant que le prélat allait du reste venir lui-même lui réitérer cette injonction et s'arrêta. Mais, ayant voulu s'asseoir sur une pierre pour s'y reposer en attendant l'évêque, celle-ci se creusa en forme de fauteuil afin qu'il fut plus à l'aise. Saint Faron fut émerveillé de tous ces prodiges et l'honora plus que jamais de son amitié. Son frère avait succédé à son père sur le trône d'Écosse. Mais la dépravation de ses moeurs étant devenue un objet de scandale pour ses sujets, il fut déposé et saint Fiacre apprit bientôt qu'une députation était en chemin pour le venir quérir et le faire roi. Il en fut effrayé et pria Dieu d'éloigner de lui les honneurs du trône qu'on voulait le forcer d'accepter. Le Seigneur l'affligea alors d'une lèpre affreuse qui fit reculer d'horreur les ambassadeurs qui lui avaient été envoyés et qui n'insistèrent plus pour son acceptation. Sitôt qu'ils furent partis le mal disparut et le saint fut radicalement guéri (1). Il décéda le 30 août vers 670. En souvenir de son jardin qu'il cultivait lui-même pour nourrir ses hôtes, les jardiniers l'ont pris pour leur saint patron, et c'est pourquoi on le voit toujours vêtu en ermite, tenant en main une pelle de jardinier. Il est aussi le patron des bonnetiers. Comme guérisseurs, il était spécialiste du fic saint-Fiacre et des hémorroïdes. Les « carrosses à cinq sols » l'heure, institués par un certain Sauvage en 1640, prirent leur nom de leur centrale à l'hôtel saint Fiacre, ainsi nommé d'une image du saint qui y était placé. Son culte est assez répandu. Dans le Finistère, divers édifices lui sont dédiés : 2 églises (Guengat et Lothey-Landremel), 4 chapelles (Crozon, Guilers, Plouider, Treffiagat), et 6 chapelles détruites (Kergloff, Lanmeur, Mahalon, Penmarc'h, Plourin-les-Morlaix, Riec-sur-Belon). Au total on relève 38 statues le représentant (2).
b) Plan C'est un édifice de plan irrégulier. La nef, d'abord sans bas-côté s'ouvre ensuite de chaque côté par deux grandes arcades : - Au sud, sur un bas-côté, sur lequel donnent le porche, la chapelle des fonts baptismaux renfermant le départ de l'escalier montant au clocher, et la chapelle du Rosaire, - Au nord, sur une vaste chapelle dite de Lanascol et qui s'étend depuis la façade ouest jusqu'à la hauteur de l'arc diaphragme. Le choeur comprend trois travées avec bas-côtés. Il est séparé de la nef par un arc diaphragme. A l'extrémité du bas-côté nord s'ouvre la sacristie. Les églises telles que celle de Guengat, par les massives piles cylindriques supportant le clocher, de parti bas, passent pour mieux exprimer l'âme bretonne, dans son romantisme.
2. - Historique Les biens paroissiaux étaient gérés par les fabriques. Jusqu'à la fin du XVIIème siècle, les fabriques sont nommées chaque année en principe par le « général » de la paroisse, l'assemblée générale des chefs de famille réunis à l'église après la messe. Puis, le Parlement de Bretagne publia alors une série d'arrêts substituant définitivement des généraux restreints à ces assemblées générales. Ils doivent comprendre seize ou dix-sept membres : le sénéchal ou l'alloué de la juridiction, le procureur du roi quand la paroisse est sous le ressort d'une juridiction royale, le seigneur ou son procureur fiscal quand elle dépend d'une justice seigneuriale, le recteur, le ou les deux fabriques en exercice et douze délibérants, choisis parmi d'anciens fabriques qui ont rendu leurs comptes et payent leurs reliquats. La gestion des biens appartenant à la fabrique paroissiale est confiée chaque année à un ou deux habitants dénommés de façon très diverses : « fabriques » le plus souvent mais aussi syndic, gouverneur, marguillier, trésorier, comptable, procureur, etc. Les fabriques possédaient peu d'argent pour construire ou modifier des églises. Il faut donc avoir recours à certains artifices. On réserve le matériau noble pour les élévations Sud, façades familières par où l'on aborde l'édifice, Ouest où s'élève le clocher, Est où le chevet clôt l'espace sacré du sanctuaire. Les façades Nord sont traitées à l'économie. Ce côté froid ne se contemple pas. Des tailleurs de pierre qui ont mis en oeuvre ces matériaux nous ne savons que peu de choses... Leurs seules archives sont les monuments qu'ils ont laissés. On sait que, sur les chantiers d'église, des charrois, pour apporter les pierres brutes, étaient effectués. Ils réunissaient tout ce qu'une paroisse possédait de chevaux, d'attelages, de véhicules aptes à affronter les chemins hasardeux des carrières. « Grands charrois », toutes les quinzaines, par toutes les saisons, suivis d'un plantureux repas, dont les comptes de paroisse gardent parfois les savoureux mémoires de frais ! La rapidité de la construction elle-même dépendait des ressources des fabriques. L'édifice actuel remonterait au XVème siècle (XIIème et XVème siècles d'après JOANNE (3)), mais il a été de nombreuses fois remanié. Il y a des raisons de penser que Guengat, quoique portant un nom qui était un nom d'homme au pays de Galles, n'est pas une paroisse primitive et qu'elle dépendit d'abord de la vaste paroisse de Plogonnec. Ainsi, la première église n'aurait été qu'une chapelle de dévotion (4).
a) XVème siècle L'église ne devait être qu'une simple chapelle et par conséquent, avait des dimensions plus réduites. De celle-ci, restent, outre les piles cylindriques massives aux chapiteaux épannelés qui portent les arcades en plein cintre, le robuste arc diaphragme en tiers-point ainsi que les petits arcs diaphragmes de la même époque, bandés dans les bas-côtés du choeur (5).
b) Début XVIème siècle L'église fut élargie à cette période.
c) 1557 A cette date, les maçons terminèrent la construction de l'ossuaire. En effet, cette date est inscrite au-dessus des deux baies ouvertes au sud. Cette partie a seulement été accolée au reste de l'édifice, le porche en particulier, déjà en place comme l'atteste l'intérieur de l'ossuaire.
d) 1571 Cette date, aujourd'hui effacée, était lisible au bas de la maîtresse-vitre du choeur. Le style flamboyant des meneaux de ce vitrail, caractéristique du XVIème siècle, permet d'affirmer que cette portion de l'édifice date bien de cette période.
e) 1660 Ian HAMOUN sculpta à cette époque les sablières qui ornent la voûte du choeur.
f) 1706 Cette année là, au cours d'un orage, le clocher s'effondra, endommageant fort le bas-côté sud. Une inscription, sur le pignon de la chapelle du Rosaire, rappelle les travaux de restauration qui durent y être effectués :
V : ET : D : MI : I : LHOSTIS : RECTEVR V : M : QVEMENER : C Y : M : F : IVZEAV : P : G : LIZEN : F : LAN : 1706 (6)
Ce qui signifie :
« Vénérable et Discret Messire Jean LHOSTIS, recteur Vénérable Messire QUÉMÉNER, curé Yves-Marie-François JUZEAU, prêtre - Guillaume LIZEN, fabrique - l'an 1706 » .
Cet effondrement du clocher permet d'expliquer le non-alignement des pignons du bas-côté sud, ainsi que l'utilisation du remplage (7) dont ont fait l'objet le pignon de la chapelle des fonts baptismaux et celui de la chapelle du Rosaire, mais aussi un vitrail entier (derrière le panneau du Rosaire) dans la même chapelle.
g) 1832 et 1838 Il est dressé, en 1832, un « Projet de Rétablissement Général de la charpente et de la toiture de l'église ». L'architecte déclare même que « le mauvais état et la vétusté de la Charpente ne permettent aucune Réparation, qu'il est même urgent de procéder le plus promptement possible à la Reconstruction » (8). Quelques jours plus tard, le maire, M. JUGEAU, adressa un devis estimatif des réparations urgentes à faire à l'église ainsi qu'un devis et un « plant » d'une Église neuve, au Préfet du Finistère. Il va même jusqu'à déclarer : « Je doit vous faire observer qu'il y a danger pour Mes administrés à se fier à la solidité de notre Église » (9). En 1833, on projette de construire une nouvelle église (10). En 1838, Clet MARCHAND, prêtre, adresse une nouvelle lettre à... LOUIS PHILIPPE, Roi des Français, par l'intermédiaire du Préfet. Il y écrit que l'église est « tout-à-fait en Ruine et dans l'impossibilité de servir au culte ». Il projette de rebâtir une Église neuve avec les Matériaux de l'ancienne pour « seize mille francs au moins ». Il déclare encore : « On a été obligé de rebâtir une partie des murs » (11). Ceci pourrait expliquer pourquoi certaines parties, qui devraient être plus anciennes, sont en réalité plus récentes. Une inscription à la voûte du choeur témoigne des restaurations qui furent effectuées :
MARCHAND : Recteur LE QUÉAU : Maire PHILIPPE : Adjoint GUÉGUEN : Trésorier 1660 - 1838
h) 1847 Il est inscrit dans les dépenses de cette année : « agrandir la porte de l'église : 100 francs » (12).
i) 1891 et 1892 Suite à l'effondrement de 1706, le clocher fut donc décapité de sa flèche. Un projet de reconstruction fut présenté en 1849 mais le préfet le refusa « attendu qu'il est irrégulier et incomplet » (13). Il fallut donc attendre le 5/IV/1891, soit près de deux siècles après l'effondrement, pour que le conseil de fabrique prenne la décision de reconstruire la flèche du clocher dont on voyait encore des débris contre la porte latérale sud (14). L'abbé ABGRALL, architecte, dressa les plans (15) et Jean-Louis LE NAOUR, entrepreneur, effectua les travaux. Jugeant que la chambre des cloches n'était pas assez solide, elle fut aussi refaite. Les travaux débutèrent après l'approbation des autori
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